N°26 – Un coupable

Édouard Rod (1857-1910)

     Il y a près d’un an, nous vous présentions une nouvelle de l’écrivain suisse Édouard Rod, Le Retour, histoire ingénieuse et drôle par son ton, l’acidité de ses portraits et de ses dialogues, quelque dramatique que fût sa trame. C’est dans le même recueil de 1891, Nouvelles romandes, que figure Un coupable. Proche de Maupassant jusque dans son titre – court, suggestif, et qui s’éclaire d’une lumière singulière à la lecture de la conclusion – Rod n’est pas davantage que lui enserré dans les canons du naturalisme : si cette histoire, par son décor et la façon dont se noue l’intrigue, est pleinement ancrée dans ce mouvement littéraire, elle évolue vers l’enquête psychologique, menée par un narrateur témoin, indispensable révélateur des tourments du personnage principal : le vieil Arnaud, consumé par le souvenir d’une tragédie survenue vingt ans plus tôt.

     L’écriture, dépouillée mais non sans compassion, est surtout virtuose par la construction du récit. Tous les événements, toutes les conversations convergent vers un climax : le retour du vieillard sur les lieux qui n’ont cessé de le tourmenter ; mais ce point culminant, loin de fournir la clef de l’énigme, est le foyer à partir duquel disparaît toute certitude. Seul trône, au terme du récit, le doute implacable.

     À propos de la Suisse, nous sommes très heureux de vous annoncer que le professeur Michel Viegnes – qui, quoique français, vit et enseigne depuis longtemps à Fribourg – rejoindra notre revue à partir de février 2019. C’est lui qui nous fera connaître, au cours de l’année, des nouvelles suisses d’hier et d’aujourd’hui.

Évariste Couy-Neveu

UN COUPABLE

     Il y a une dizaine d’années, un procès dont j’étais chargé m’obligea à me rendre plusieurs fois de Lausanne au Sentier, dans la vallée du Lac de Joux.

     D’abord, ce long trajet de montagne à faire par tous les temps dans une médiocre diligence me parut extrêmement fastidieux. Puis, peu à peu, je me familiarisai avec ce paysage jurassien que je traversais en rêvant, auquel je laissais donc quelque chose de moi-même, et je l’aimai. J’aimai la mélancolie austère de ses horizons sombres, ses plaintives forêts de sapins, ses pâturages d’un vert aigu hérissés de dures gentianes jaunes, ses chalets isolés et silencieux, son lac surtout – ce lac mystérieux qui reçoit plusieurs rivières, n’en rend aucune, et vide le trop-plein de ses eaux foncées et lourdes dans des entonnoirs souterrains. Je m’affectionnai aussi aux habitants de ce coin de pays qui nomment leur vallée « la Vallée », comme s’il n’en existait aucune autre au monde : de braves gens, à la fois montagnards, paysans et industriels – le plus souvent horlogers – descendants d’un petit nombre de familles de réfugiés français, aux mœurs antiques, intelligents, laborieux, économes, instruits, honnêtes jusqu’au scrupule et pieux jusqu’à la dévotion.

     La diligence me prenait à la station de Romainmôtier, vers les quatre heures de l’après-midi, et me conduisait pour la nuit au Sentier, en me laissant le temps de « souper » à l’auberge principale du grand village du Pont. Là, on me servait, après une assiette de soupe, une de ces délicates truites de rivière qui sont la spécialité de l’endroit et un morceau d’excellent « vacherin », le savoureux fromage du pays. L’hôte me saluait, acceptait un verre de « petit blanc », et, au départ, me serrait la main avec un cordial « au revoir ».

     À chacune de mes haltes, j’apercevais dans un angle de la salle, attablé devant un verre d’absinthe, un vieux bonhomme barbu, trapu, à face rougeaude, plus négligemment vêtu qu’il n’est d’usage dans le pays, fumant sa pipe en contemplant son verre et toujours absorbé dans une rêverie d’ivrogne ou, peut-être, dans de lointaines ressouvenances. L’hôte, que je finis par interroger sur cet immobile consommateur, me répondit :

     – C’est M. Arnaud, qui était syndic du Pont en 1855, l’année « du crime ».

   *  *  *

     Le cor de la diligence me rappela avant que je pusse demander des détails sur ce crime, qu’on appelait le crime, comme on dit la Vallée.

     Or, à mon passage suivant, par une froide mais claire soirée d’octobre, un accident arriva à la diligence, et l’on m’avertit qu’il faudrait plusieurs heures pour la remettre en état. J’étais seul voyageur, et l’aubergiste, mon interlocuteur habituel, ayant été réquisitionné pour venir en aide au conducteur, je me trouvai seul dans la salle – seul avec le vieux buveur qui fumait devant son verre à moitié vide. Curieux de le voir de plus près, j’allai m’asseoir à la table proche de la sienne ; je me fis servir un vermouth en attendant mon repas et, ouvrant un journal qui se trouva sous ma main, je me mis à l’examiner.

     Il eut bientôt le sentiment que je m’occupais de lui. Lentement, comme si elle lui pesait très lourd, sa grosse tête se souleva ; ses yeux, qu’il tenait toujours à demi-fermés, s’ouvrirent davantage pour se fixer sur moi ; ses lèvres remuèrent comme s’il voulait parler ; il toussa ; puis, d’une main qu’un tremblement continuel agitait, il prit son verre, se leva avec effort, et vint s’attabler en face de moi. Je posai mon journal et le saluai de quelques mots qu’il ne parut pas entendre. Il avait repris sa pose accoutumée, les yeux demi-clos, la tête baissée, et je crus qu’il allait rester enfermé dans son éternel silence. Son voisinage immédiat me devint gênant, je sentis une sorte de malaise, et, pour me donner une contenance devant cet homme qui ne me voyait peut-être pas, je reprenais mon journal, quand tout à coup il avança vers moi sa lourde main osseuse, la posa sur mon bras – je sentis courir en moi un tremblement nerveux – et me dit :

     – Vous ne savez pas l’histoire du crime, vous ?…

     Stupéfait, je fis un signe d’ignorance. Il reprit aussitôt, sourdement :

     – Eh bien ! je vais vous la raconter…

     Et, sans lâcher mon bras, sur lequel sa main se crispait par moments à me faire mal, il se mit à parler, avec l’accent lent du pays, en courtes phrases haletantes, les traits immobiles et comme figés dans une expression qui ne changeait jamais.

*  *  *

     – Voici… C’était en 1855, il y a vingt ans… J’étais syndic du Pont… Un matin, le père Meylan, le garde-champêtre, vient m’appeler, tout bouleversé… Il me dit comme ça : « Vous ne savez pas, monsieur Arnaud ?… Le père Mathurin est assassiné ;… il y a son corps sur la route, du côté du Lieu ;… venez voir… »

     Il s’arrêta un moment :

     – C’est que vous ne savez pas qui était le père Mathurin, vous ?… C’était un colporteur français, voilà !… Il demeurait aux Rousses… Il « faisait » la Vallée en vendant des plumes, du papier, des porte-monnaie… On le connaissait depuis des années et des années…

     »  Pas une âme ne lui aurait fait du mal… C’était un brave homme, allez !… Protestant comme nous !… Il racontait des histoires aux enfants, et il expliquait la Bible… La veille, je lui avais encore acheté des joujoux pour ma petite…

     » Voilà que je sors avec le père Meylan… Des tas de gens se tenaient sur la route, tout le village, quoi !… Et le père Mathurin était déjà tout raide, et blanc, voyez-vous, blanc comme de la neige… Je vivrais cent ans que je ne l’oublierais pas !… Tenez, à présent, je le vois comme si c’était vous, avec sa vieille figure ridée et ses cheveux gris… Et il avait l’air si calme !… pour sûr, il était au ciel, celui-là !… Le père Meylan me dit qu’il fallait voir si son cœur battait encore… Mais plus rien !… Il était bien mort !… Il avait six coups de couteau : ici, là, là, là, là et là… »

     Il marqua les places sur sa poitrine ; son front était trempé de sueur ; par moments, les mots semblaient s’arrêter dans sa gorge, et on eût dit qu’il les arrachait de force. Il se tut quelques minutes, contemplant sans doute le cadavre du vieillard photographié dans son souvenir, puis il reprit encore :

     – Piguet, le régent, me demanda : « Qui est-ce qui a pu faire le coup ? » Mais je ne savais pas, moi, n’est-ce pas ?… qui aurait pu savoir ?… Jamais il n’y avait eu d’assassinat dans le pays !… On n’avait rien pris au père Mathurin… « Ça doit être une vengeance ! » que dit le père Meylan… Une vengeance de qui et de quoi ?… Tout le village l’aimait, le pauvre vieux qu’on voyait revenir deux fois l’an, comme un oiseau qui porte bonheur !… On s’est mis à chercher, il est venu des gendarmes, des juges, toutes sortes de gens… Inutile !… Et on chercherait encore qu’on ne trouverait pas !… On ne trouvera jamais, jamais, c’est moi qui le dis !… Non, on ne trouvera jamais l’assassin du pauvre père Mathurin !… »

     Sa voix baissait et finit par se perdre dans une espèce de sanglot. Un moment encore, il laissa sa grosse main sur mon bras, puis ses doigts se détendirent, il poussa deux ou trois soupirs pareils à des gémissements ; enfin, il porta son verre à ses lèvres, but quelques gorgées, se leva et s’en retourna dans son angle, où il reprit sa pose hiératique. En le regardant, je pus me demander si j’avais rêvé, si cet être immobile venait bien réellement de se trouver en face de moi, sa main sur mon bras, et parlant…

*  *  *

     La servante vint m’avertir que mon repas était servi sur une autre table. Je n’avais plus grand’faim : pourtant, j’essayai de manger ma soupe. Comme l’aubergiste rentrait, je l’appelai :

     – Voyons, lui dis-je, expliquez-moi en détails ce que c’est que cet étrange personnage qui vient de me raconter l’histoire du père Mathurin ?…

     Le brave homme sourit placidement et me répondit :

     – Ah ! il vous l’a racontée !… Je pensais bien qu’il vous la raconterait une fois : il la raconte à tout le monde… ça lui tourne dans la tête, et il ne peut penser à autre chose… C’est drôle, tout de même !… Mais il n’est pas heureux, le pauvre vieux !…

     – Mais pourquoi donc se souvient-il avec une pareille netteté d’un crime que tous les autres gens du village ont oublié depuis longtemps ?

     – Ah ! voilà !… C’est que, comme je vous l’ai dit, il était syndic quand le crime a été commis… C’est lui qui a relevé le cadavre, lui qui a fait les constatations et les enquêtes, lui qui s’est démené avec la police pour chercher l’assassin… Et tout ça lui a frappé l’imagination… D’abord, on ne s’est aperçu de rien, il était comme toujours, un peu plus agité seulement… On disait : « Ce pauvre syndic, a-t-il eu du mal, avec cette affaire !… » Puis, quand l’instruction a été terminée, il a donné sa démission de syndic, en disant qu’il n’était pas digne de ces fonctions, puisqu’il laissait assassiner les gens !… Comme si c’était sa faute, n’est-ce pas ?… Pour lui montrer qu’on avait confiance en lui, on a voulu le nommer au Grand Conseil. Il a refusé… C’était le plus gros propriétaire du pays, et tout le monde le considérait… Mais voilà qu’il a perdu sa femme et son fils, qui est mort d’un coup de froid attrapé à la frontière, pendant la guerre… Alors, il s’est mis à boire, en rabâchant toujours l’histoire du père Mathurin… Les gens se sont éloignés de lui, et il a fini par ne plus causer qu’avec les étrangers auxquels il va raconter le crime… Pour sûr, il est devenu un peu fou… et l’absinthe y aide… Il ne s’occupe plus de rien, ses affaires sont en désarroi, ses biens hypothéqués, et s’il vit encore quelques années, il tombera à la charge de la commune.

*  *  *

     Depuis que je fréquentais les habitants de la Vallée, je savais à quel point la conscience de ces braves gens est développée et susceptible, et combien, en ces âmes recueillies, le scrupule peut devenir torturant. Cependant, le cas de l’ancien syndic me parut extraordinaire. J’y vis tout de suite un de ces bizarres détraquements cérébraux, qui résultent de l’exagération d’une faculté ou des ravages d’une idée auxquels les psychologues commencent à s’intéresser ; et j’eus la curiosité de l’examiner de plus près. Sitôt mon repas achevé, je me rapprochai du vieux buveur qui venait de se faire servir une nouvelle absinthe :

     – Est-ce loin du village, lui demandai-je, que l’assassinat a été commis ?…

     Il souleva ses paupières, me regarda un instant, se leva et me dit :

     – Venez voir !…

     Nous sortîmes ensemble.

     Le village était silencieux. Les maisons, les toits avec leurs cheminées, les arbres, la vieille église massive se dessinaient nettement dans la clarté blanche de la lune. Dans l’air froid et vif, on entendait craquer des branches, tandis que les rameaux éternellement verts des sapins répétaient leur plainte monotone. Les flots du lac, qu’une grande ligne claire coupait dans sa largeur, amenés par le vent en lames régulières sur les cailloux du rivage, se plaignaient comme les sapins, de cette voix douce des choses passives. Et, sur la route, l’ombre d’Arnaud s’allongeait à côté de la mienne…

     Il marchait d’un pas lourd, le dos voûté, la tête basse, les bras ballants, zigzaguant un peu. Il gardait dans sa bouche sa pipe éteinte. Il ne disait rien. Mais à mesure qu’on avançait dans la solitude, sur la route qui chemine à quelque distance du lac, sa démarche devenait plus pénible. Quoique sa physionomie demeurât immobile et qu’il marchât lentement, sa respiration me parut haletante, essoufflée, et le moment arriva où il n’avança plus qu’avec des efforts extrêmes. À un contour du chemin, où trois arbres forment une sorte de triangle, il s’arrêta, respira, et me dit avec un geste saccadé, presque automatique, du bras droit :

     – C’est ici !…

     Le lieu n’avait rien de sinistre.

     Je voulus adresser des questions au vieillard ; mais, contre mon attente – une fois sa première émotion surmontée – il s’exprima plus abondamment qu’à l’auberge, comme si, obligé à faire un plus grand effort, il arrivait, par le fait de l’énergie dépensée, à remettre quelque lucidité dans ses idées.

     – Le cadavre était là, fit-il, au pied de ce sapin… étendu dans ce sens… les deux bras presque en croix, la jambe gauche un peu courbée… Il n’y avait pas beaucoup de sang… La terre était humide, et l’on a pu suivre les traces de l’assassin… Il portait de gros souliers à clous… Après le meurtre, il est allé vers le lac, par ce petit sentier qui traverse le champ… Peut-être qu’il s’est lavé les mains… Il est revenu, et il a fait une centaine de pas du côté du Lieu, pour donner le change… et il est rentré au Pont… Au commencement du village, les traces se perdaient… (il eut une brève hésitation) à dix pas de ma maison… On n’a pas retrouvé le couteau… Il ne manquait rien dans les « affaires » du père Mathurin, qui avait une cinquantaine de francs dans sa poche… Comprenez-vous un mystère pareil ?… À présent, on ne découvrira rien, c’est sûr… C’est trop vieux… tout le monde a oublié… Il n’y a que moi… qui n’oublie pas !…

*  *  *

     Quand il prononça cette dernière phrase, sa voix se déchira et, comme il demeurait immobile, anéanti, le regard attaché à la place fatale, le problème qui m’avait déjà inquiété se posait plus nettement à mon esprit : comment un homme de sens – un homme que ses concitoyens, non des paysans ignares, mais des gens intelligents et instruits, chargeaient de leurs intérêts parce qu’ils le regardaient comme le plus capable et le plus honnête d’entre eux – comment un tel homme avait-il pu être frappé par le fait d’un meurtre commis sur un étranger au point d’en devenir monomane ? Quelque affinée que soit une conscience par le perpétuel examen des problèmes moraux, elle ne peut arriver naturellement à de pareilles aberrations ; d’un autre côté, la paisible existence de ces populations montagnardes est trop simple et trop saine pour provoquer des troubles intellectuels qu’expliquent seuls les fatigues, les ambitions, les dérèglements et les excès de la vie des capitales.

     Je me tins rapidement ces raisonnements pendant qu’Arnaud demeurait à la même place, comme hypnotisé par ses souvenirs. Je le regardai de nouveau : sa face était toujours immobile, mais la sueur dégouttait sur ses joues, et il y avait quelque chose de terriblement tragique dans ce masque muet que l’angoisse mouillait. Alors, un soupçon, qui s’était peut-être ébauché déjà dans mon esprit, se formula soudain, horrible, affolant ; et ce fut instinctivement, sans réfléchir, que je m’écriai :

     – Mais malheureux, c’est vous… c’est vous qui l’avez tué !…

     Arnaud se tourna tout d’une pièce, les yeux démesurément ouverts, la taille presque redressée. Un peu d’écume vint à ses lèvres. Il ferma ses gros poings et marcha sur moi ; et, comme je reculais, il s’affaissa sur le sol, en râlant :

     – Ah ! ne me dénoncez pas ! dites, ne me dénoncez pas !…

     Et il se traînait à terre en tordant ses mains jointes. Enfin, ses traits avaient remué, et sa face convulsée, à la bouche tordue, aux narines dilatées, aux yeux énormes, exprimait une indicible terreur. Quelque chose de son épouvante passait en moi, en même temps qu’il me venait pour lui une immense pitié. Quel crime méritait cette torture de vingt années ? Quelle peine pouvait être comparée à cette impunité ?… Et il répétait sa prière, de sa voix morte, avec ses gestes éperdus :

     – Ne me dénoncez pas ! ne me dénoncez pas !…

     – Soyez tranquille, lui dis-je, je ne suis pas juge informateur, je garderai votre secret… Mais pourquoi avez-vous ?…

     Il devina ma pensée et m’interrompit en criant :

     – Non, non, non, je ne peux plus rien dire, je ne peux plus… On ne le saura jamais, jamais !…

     Et, se relevant, agile tout à coup comme un jeune homme, il s’enfuit en courant du côté du village…

…………………………………………………………………………………………………………………………………

     Mon affaire s’étant trouvée suspendue, l’hiver se passa sans que j’eusse l’occasion de revenir à la Vallée ; mais, au printemps suivant, je dus recommencer mes courses au Sentier. La première fois que je m’arrêtai au Pont, je remarquai que l’angle où le vieil Arnaud buvait son absinthe était vide.

     – Eh bien ! demandai-je à l’aubergiste, qu’est-il donc devenu, votre ancien syndic ?…

     – Ah ! le pauvre homme, me fut-il répondu, c’est une triste histoire !… je vous le disais bien, qu’il était un peu fou… Eh bien ! il l’est devenu tout à fait : il a fini par se persuader que c’était lui l’assassin du père Mathurin ; il est allé se dénoncer, et on a dû l’enfermer dans un hospice.

     – Mais, fis-je après une hésitation, s’il n’était pas fou ?… s’il était réellement le coupable ?…

     L’hôte me regarda stupéfait :

     – Lui ! s’écria-t-il… Comment voulez-vous qu’il ait commis un crime pareil ?… Jamais il n’a fait de mal à personne, et c’était le plus honnête homme du pays !…

     Cette robuste confiance ébranla ma conviction. Je gardai pour moi les aveux du vieil Arnaud et je ne sus jamais si j’avais eu affaire à un assassin dévoré de remords ou à la victime d’une idée fixe.

Édouard Rod

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